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Le préjudice, ce n’est pas automatique

La Chambre Sociale a rendu, le 16 avril 2016, un Arrêt (n°14-28293) dont le retentissement est inversement proportionnel à l’enjeu du litige en cause (remise au salarié de documents de fin de contrat), et à la concision de son attendu de principe, ainsi rédigé :

 

« Mais attendu que l'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond ; que le conseil de prud'hommes, qui a constaté que le salarié n'apportait aucun élément pour justifier le préjudice allégué, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision »

 

De nombreux commentateurs ont en effet considéré que cet Arrêt (qui devrait figurer au rapport annuel de la Cour de Cassation) marquait un revirement sur la notion de « préjudice nécessairement causé ».

 

Jusqu’alors, en effet, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation, suivie en cela par la plupart des Cours d’Appel et des Conseils de Prud’hommes, considérait que l’inobservation par l’employeur de certaines règles ouvrait nécessairement droit à indemnisation au profit du salarié :

  • Inobservation de la procédure de licenciement,
  • Non remise, ou remise tardive (c’était le cas en l’espèce) de documents sociaux,
  • Défaut de visite médicale d’aptitude, ou de reprise,
  • Absence de contrepartie financière dans une clause de non-concurrence.

Sur cette dernière question, un Arrêt du 16 mai 2016 (n°14-20578) complète l’évolution récente, en rejetant un Pourvoi contre un Arrêt de Cour d’Appel (Poitiers), et approuvant celle-ci d’avoir considéré qu’une clause de non-concurrence illicite ne causait pas nécessairement un préjudice au salarié :

« Mais attendu que l'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond ; que la cour d'appel, ayant constaté que le salarié n'avait subi aucun préjudice résultant de l'illicéité de la clause de non concurrence, le moyen ne peut être accueilli »

 

Il n’y a là, en définitive, qu’un retour à un principe essentiel du droit, et de l’administration de la preuve, découlant notamment de l’Article 9 du Code de Procédure Civile :

« Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention »


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