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Accuser de harcèlement moral n'est pas diffamatoire

La Première Chambre Civile de la Cour de Cassation a rendu, le 28 septembre 2016, un Arrêt remarqué (n° 15-21823) intervenu dans une affaire dans laquelle une salariée se voyait reprocher une diffamation par son employeur et deux cadres qu’elle avait accusés de harcèlement moral dans un écrit remis au CHSCT et à l’Inspecteur du Travail.

Cette décision écarte la possibilité de considérer comme diffamatoires la dénonciation par un salarié de faits de harcèlement, en considérant que l’administration de la preuve spécifique au droit de la presse serait trop lourde. La Cour précise :

« Que ces exigences probatoires sont de nature à faire obstacle à l'effectivité du droit, que la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale a reconnu au salarié, de dénoncer, auprès de son employeur et des organes chargés de veiller à l'application des dispositions du code du travail, les agissements répétés de harcèlement moral dont il estime être victime » ;

Cette interdiction d’invoquer la diffamation est tempérée par l’énonciation suivante : « Que, toutefois, lorsqu'il est établi, par la partie poursuivante, que le salarié avait connaissance, au moment de la dénonciation, de la fausseté des faits allégués, la mauvaise foi de celui-ci est caractérisée et la qualification de dénonciation calomnieuse peut, par suite, être retenue. ».

Rappelons que la dénonciation calomnieuse est un délit pénal prévu et réprimé par l’Article 226-10 du Code Pénal

Sans en reprendre ici en détails les mécanismes, il faut juste rappeler qu’une dénonciation ne peut être considérée comme calomnieuse que si elle est faite « de mauvaise foi », selon le texte précité.

Dans un Arrêt qui avait été rendu cette fois par la Chambre Sociale de la Cour de Cassation, le 29 septembre 2010 (n°09-42057) dans une affaire de licenciement, il a été posé le principe suivant :

« Attendu que le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif sauf mauvaise foi laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis… »

Autrement dit, un salarié auteur d’accusations de harcèlement ne peut se voir reprocher de diffamation, mais une dénonciation calomnieuse, laquelle n’est punissable que si le délateur a été de mauvaise foi, laquelle n’est pas caractérisée alors même qu’il invoque des faits qui n’existent pas …

En résumé, une impunité totale a été soigneusement assurée à tous, aussi bien menteurs que victimes.

Chacun appréciera …


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