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Quelques aspects de la Loi « Sapin II »

 

Il ne sera pas ici question « des lanceurs d’alerte », dont cette Loi crée une nouvelle définition, sujet déjà abondamment traité, mais de la procédure de signalement imposée aux entreprises de plus de cinquante salariés, ainsi que des mesures anti-corruption qu’elles devront mettre en œuvre.

Ces dispositions n’entreront en application qu’à partir du 1er juin 2017.

Par ailleurs, la plupart d’entre-elles renvoient à des Décrets en Conseil d’Etat, non encore parus.

 

  • Procédures de recueil des signalements émis par les membres du personnel

 

 

L’instauration de ces procédures est édictée par l’article 8 III de la Loi, dans les termes très généraux qui suivent :

« Des procédures appropriées de recueil des signalements émis par les membres de leur personnel ou par des collaborateurs extérieurs et occasionnels sont établies par les personnes morales de droit public ou de droit privé d'au moins cinquante salariés, les administrations de l'Etat, les communes de plus de 10 000 habitants ainsi que les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont elles sont membres, les départements et les régions »

 

Le texte est ainsi d’une particulière imprécision sur l’organisation de ces « procédures », et l’exigence que celles-ci soient « appropriées ».

Dans sa grande sagesse, comme il est d’usage d’écrire en pareil cas, le Législateur a prévu que ces obligations seraient applicables « dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ».

Enfin, l’article 8 prévoit qu’indépendamment même de ces procédures, « Toute personne peut adresser son signalement au Défenseur des droits afin d'être orientée vers l'organisme approprié de recueil de l'alerte ».

Rien n’est précisé, là encore, sur les conditions et modalités suivant lesquelles cette « orientation » se fera.

  

  • Mesures destinées à prévenir et à détecter la commission, en France ou à l'étranger, de faits de corruption ou de trafic d'influence

 

 

Il faut tout d’abord noter que cette obligation incombe au premier chef aux dirigeants des entreprises de plus de 500 salariés, et non aux personnes morales elles-mêmes (ce qui pourra avoir une incidence notable, en matière de responsabilité pénale, le cas échéant).

Ce principe est posé à l’article 17 de la Loi :

« Les présidents, les directeurs généraux et les gérants d'une société employant au moins cinq cents salariés, ou appartenant à un groupe de sociétés dont la société mère a son siège social en France et dont l'effectif comprend au moins cinq cents salariés, et dont le chiffre d'affaires ou le chiffre d'affaires consolidé est supérieur à 100 millions d'euros sont tenus de prendre les mesures destinées à prévenir et à détecter la commission, en France ou à l'étranger, de faits de corruption ou de trafic d'influence… »

Le contrôle de ces mesures sera confié à l’Agence Française Anticorruption, le pouvoir étant donné par la Loi à la « Commission des sanctions » de « prononcer une sanction pécuniaire dont le montant ne peut excéder 200 000 € pour les personnes physiques, et un million d'euros pour les personnes morales ».

Il est également renvoyé à un Décret en Conseil d’Etat pour ce qui est des « conditions de fonctionnement de ladite Commission…

Les mesures et procédures « appropriées » sont présentées en ces termes par l’article 17 II de la Loi :

 

Un code de conduite définissant et illustrant les différents types de comportements à proscrire comme étant susceptibles de caractériser des faits de corruption ou de trafic d'influence. Ce code de conduite est intégré au règlement intérieur de l'entreprise et fait l'objet, à ce titre, de la procédure de consultation des représentants du personnel prévue à l'article L. 1321-4 du code du travail ;

Un dispositif d'alerte interne destiné à permettre le recueil des signalements émanant d'employés et relatifs à l'existence de conduites ou de situations contraires au code de conduite de la société ;

Une cartographie des risques prenant la forme d'une documentation régulièrement actualisée et destinée à identifier, analyser et hiérarchiser les risques d'exposition de la société à des sollicitations externes aux fins de corruption…

4° Des procédures d'évaluation de la situation des clients, fournisseurs de premier rang et intermédiaires au regard de la cartographie des risques ;

Des procédures de contrôles comptables, internes ou externes, destinées à s'assurer que les livres, registres et comptes ne sont pas utilisés pour masquer des faits de corruption ou de trafic d'influence…

6° Un dispositif de formation destiné aux cadres et aux personnels les plus exposés aux risques de corruption et de trafic d'influence ;

Un régime disciplinaire permettant de sanctionner les salariés de la société en cas de violation du code de conduite de la société ;

Un dispositif de contrôle et d'évaluation interne des mesures mises en œuvre.

Ce n’est là qu’un premier aperçu, au plus près du texte, et des incertitudes qu’il engendre.

La lourdeur de ces dispositifs sera-t-elle un gage d’efficacité au-delà d’inutiles contraintes de pure forme ?

L’avenir le dira (les Décrets non encore parus aussi, peut-être …)


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